L'Antithèse De L’Inconscience


C’est Ce Qui M’est Apparu Très Clairement Il Y A De Nombreuses Années, Lorsque Je Faisais Mes Études De Psychologie À Chicago. 

Nous avions un cours de psychopédagogie. Celui-ci n'était accessible qu'aux prêtres qui avaient déjà pratiqué cette discipline. Ils étaient tenus d'apporter au cours l'enregistrement de l'une de leurs interviews. 

Nous étions environ une vingtaine. Lorsque vint mon tour, je vins en classe avec l'enregistrement d'une entrevue avec une jeune femme. 

Après cinq minutes d'écoute, le professeur arrêta la cassette, comme il avait coutume de le faire, pour demander aux élèves s'ils voulaient commenter ce qu'ils venaient d'entendre. 

L’un D’eux Me Demanda : « Pourquoi Avez-Vous Posé Cette Question

Je ne crois pas avoir posé de question, répondis-je. En fait, je suis quasiment sûr de n'avoir posé aucune question. 

— « Vous Vous Trompez », Affirma Mon Condisciple.

Si j'étais aussi sûr de ne pas avoir posé de questions, c'est parce que je travaillais à cette époque suivant la méthode de Cari Rogers, qui est non directive et orientée sur la personne. 

Elle consiste à ne pas poser de questions, à ne pas interrompre et à ne pas donner son avis. Dans mon esprit, il était évident que je n'avais pas posé de questions à la jeune femme. 

Quoi qu'il en soit, nous continuâmes, mon interlocuteur et moi, à nous contredire, jusqu'à ce que le professeur propose de repasser l'enregistrement. Ce que nous fîmes. 

Alors, à ma grande horreur, j'entendis la question. Elle était là, énorme, grosse comme l'Empire State Building. Et ce qui est étonnant, c'est que je l'avais entendue trois fois : la première quand je l'avais posée, la deuxième quand j'avais écouté l'enregistrement dans ma chambre (je voulais m'assurer que celui-ci était bon), et la troisième en même temps que mes condisciples. Et malgré cela, mon cerveau ne l'avait pas enregistrée. 

Je n'en avais aucune conscience!

Ce phénomène se produit fréquemment lors de mes consultations thérapeutiques ou dans le cadre de ma direction spirituelle. 

J’enregistre l'entretien que j'ai avec la personne qui me consulte et, lorsque nous écoutons l'enregistrement, il ou elle me dit : « Vous savez, je n'ai pas bien entendu ce que vous avez dit durant notre entretien. Je n'ai bien entendu notre conversation que lorsque j'ai écouté l'enregistrement. » 

Ce qui est plus intéressant encore, c'est que moi non plus je n'ai pas entendu ce que j'ai dit pendant l'interview. Et je suis très contrarié lorsque je me rends compte que je dis des choses sans en avoir conscience, surtout lors de consultations. 

Le sens de mes paroles ne m'apparaît pleinement que plus tard

Peut-on appeler cela un comportement humain? Oubliez-vous et observez les autres, dites-vous

Quoi qu'il en soit, après que nous ayons écouté en entier l'enregistrement de Chicago, le professeur demanda aux étudiants s'ils avaient d'autres commentaires. 

L'un des prêtres, un homme d'une cinquantaine d'années que j'aimais beaucoup, me dit : « Tony, J’aimerais Vous Poser Une Question Personnelle. Vous Permettez? — Allez-y, lui dis-je. De toute façon, je ne vous répondrai que si je le veux bien. » 

Alors il m’a demandé : « Est-ce que cette jeune femme était jolie? »

Franchement, je vous dirai que j'en étais à une étape de mon développement où je ne voyais pas si les gens qui m'entouraient étaient agréables à non. Cela ne m'intéressait pas. Cette jeune était une brebis du troupeau du Christ, et moi berger. Mon rôle était de l'aider. N'était-ce pas ordinaire? C'était de cette manière que nous étions formés. 

Alors j'ai répondu à mon ami prêtre : « Quel est le rapport avec ce que nous avons à faire?

— « Vous Ne L’aimez Pas, N’est-Ce Pas? » a-t-il dit.

Il ne m'était jamais venu à l'esprit que je pouvais aimer ou détester un individu. Comme la plupart des gens, il m'arrivait d'avoir des sentiments négatifs, ma conscience enregistrait à mon insu, mais mon attitude était généralement neutre.

Je demandai au prêtre : « Qu'est-ce qui vous fait dire cela? »

— « L’Enregistrement », répondit-il. Alors nous avons réécouté la cassette et il m'a dit : « Écoutez Votre Voix. Avez-Vous Remarqué Comme Elle Est Devenue Douce Au Cours De L’entretien? Vous Étiez Irrité, N’est-Ce Pas? » Oui, je l'étais, mais je ne m'en étais pas rendu compte. 

Et qu'ai-je dit à cette femme de manière soi-disant non directive? Je lui ai dit : « Ne revenez pas ». Mais je n'en ai pas eu conscience. 

Alors mon ami prêtre a ajouté : « C’est Une Femme. Elle A Certainement Compris. Quand Devez-Vous La Revoir? » Mercredi prochain. « Je Parie Qu’elle Ne Viendra Pas. » 

Il avait raison, elle ne vint pas. J'ai attendu la semaine suivante et elle n’est toujours pas venue. Alors je l'ai appelée. J'ai brisé une de mes règles : ne pas jouer les sauveurs.

Je l'ai donc appelée et je lui ai dit : « Vous vous rappelez cet enregistrement que vous m'avez autorisé à faire entendre à ma classe? Il m'a été d'une grande aide parce que les élèves m'ont fait remarquer une série de choses (je ne lui ai pas dit de quoi il s'agissait!) qui vont rendre la session beaucoup plus efficace. Et si vous revenez, elle pourrait être encore plus efficace. »

— « Très bien, je reviendrai », a-t-elle dit. 

Le sentiment négatif était toujours là. Il était toujours là, mais il ne me barrait plus le chemin.

Lorsqu'on est conscient d'une chose, on peut prendre le contrôle sur cette chose. 

Lorsqu'on n'est pas conscient d'un sentiment, c'est lui qui a le contrôle sur vous. On est toujours l'esclave de ce dont on n'est pas conscient. C'est en prenant conscience d'un sentiment qu'on s'en libère.

Il est toujours là, mais on n'est plus atteint par lui. On n’est plus sous son influence, on n'est plus son esclave. C'est là qu'est la différence.

Extrait De 
« Quand La Conscience S’éveille »

— Anthony De Mello —