Ta Lente Main Vola…


Ta lente main vola de mes yeux vers le jour
Et la lumière entra comme un rosier ouvert. 

Et le sable et le ciel souverains palpitaient 
On eût dit un rucher taillé dans les turquoises.


Ta main a touché des syllabes qui tintaient, 
Des coupes et des burettes aux huiles jaunes, 

Des corolles, des sources et puis surtout, l'amour, 
L’amour — Ta pure main épargna les cuillères.

Et le soir s'en alla. 

Sur le sommeil de l'homme 
La nuit glisse, en secret, sa capsule céleste. 

Oh la triste odeur sauvage du chèvrefeuille !


Alors sur mes yeux que l'ombre avait dévorés 
Ta lente main volant de son vol 

Referma son plumage
Que je croyais avoir perdu.

Extrait de « La Centaine d’Amour »

➤ Pablo Neruda —