Cher Cœur…



Que j'aime voir briller ton minuscule empire, 
Les armes de la cire et de l'huile et du vin,


De l'ail, et de ce sol que tes mains ont ouvert, 
De la substance bleue qu'elles ont allumée, 


De la transmigration du songe à la salade, 
Du serpent enroulé du tuyau d'arrosage.


De ta faucille tu soulèves les senteurs, 
Je te vois présider au savon dans la mousse,


Tu gravis mes échelles et mes escaliers fous,


Et tu découvres dans le sable du cahier, 
Fouillant les symptômes de ma calligraphie 


Les lettres égarées qui ont cherché ta bouche.


— Extrait de « La Centaine d’Amour »

 Pablo Neruda —